samedi 5 décembre 2015

Roba et autres parcours...

Le poids d'un choix : Roba

J'ai tenu à faire un article sur un documentaire Ethiopie : Entre tradition et modernité diffusé par Arte, car tout simplement j'ai adoré ce documentaire. Egalement, j'ai craqué sur deux recueils de la collection Carnet de sagesse. Ce documentaire et ces livres ont plusieurs points commun. 


Le parcours de Roba

Dans le documentaire Ethiopie : Entre tradition et modernité, on suit le parcours de Roba gardien de bétail dans un petit village. Tout semble tracé pour lui mais voilà Roba aime l'école, il rêve de poursuivre ses études. Ses frères et même ses parents ne l'ont jamais bien compris. Pour eux, ce n'était pas nécessaire d'aller si loin dans les études. Roba pourtant est convaincu qu'aller à l'université est une suite logique. Cette décision va le conduire à déshonorer ses parents puisqu'il va préférer l'exil au mariage. 
Roba va donc quitter une mère en pleure et un père en colère pour Addis-Abeba. Il prend des nouvelles de sa famille, mais on lui conseille de ne pas revenir...les plaies sont encore ouvertes, c'est trop tôt! 

"Si tu ne sais pas où tu vas, regarde d'où tu viens"

Pour moi, Roba est plein de courage. Issu du peuple des Karayu, il avait le devoir de perpétuer la tradition. "Les Karayu, qui font partie de l'ethnie Oromo, vivent à l'est de l'Ethiopie, dans la vallée de l'Awash. Etant parmi les derniers à maintenir leur mode de vie pastoral, ils sont considérés par de nombreux Oromo comme les gardiens de la culture traditionnelle.(Source)". Roba, lui, choisira l'université, les langues étrangères. On verra que cette ambition l'emmènera plus loin encore. Et si finalement, en tournant le dos en apparence à la tradition, il avait contribué à la préserver? Et si finalement, dans une apparente désobéissance, il n'avait fait qu'honorer? 

J'espère vous avoir mis l'eau à la bouche, et qu'après cette lecture vous vous empresserez de visionner le documentaire.

Carnets de sagesse : Paroles d'Afrique & Paroles de Touaregs

En ce qui concerne Les carnets de sagesse, je suis tombée sur une pépite, car je les parcours avec émerveillement. Il s'agit de Paroles de Touaregs et Paroles d'Afrique. La collection compte une trentaine d'ouvrages. Les textes recueillis par Gérard Dumestre pour Paroles d'Afrique et par Maguy Vautier pour Paroles de Touaregs viennent d’ouvrages comme La graine de la Parole, La pêche de Fabaly, Contes du pays malinké, Kaïdara, La femme bleue, Je suis né avec du sable dans les yeux , etc...
Vous l'avez compris ces deux ouvrages sont des recueils. Il est donc difficile de faire autrement que de juste vous donner mon ressenti. Lorsqu'on lit ces recueils, on prend conscience de ce qui constitue en partie, une culture avec ses rites, ses codes. Egalement, on prend la mesure des difficultés et des tragédies que rencontrent des hommes et des femmes partout dans le monde. Tout cela sous la forme d'une poésie parfois douce, parfois violente. 


Voici deux extraits 

Paroles d'Afrique

Texte extrait de Paroles très anciennes, Sory Camara. 

Tu peux parler sans t'entendre. Si tu veux t'entendre il te faudra revenir sur ta parole; sans cela tu n'en connaîtras pas le fondement, jamais. Si quelqu'un se lève, qu'il s'asseye. S'il se lève à nouveau afin de se voir se levant, c'est cela voir " le voir". Et celui qui voit "le voir" peut se taire et s'entendre parler, celui-là est un diseur de paroles profondes. 

Paroles de Touaregs

Texte de Mano Dayak

Il faut avoir vécu la lente méditation que rythme le pas muet et somnolent d'un dromadaire à travers la mort blanche des sables pour comprendre vraiment ce qui sera arraché à l'homme, avec la disparition du dernier nomade. 

Faut-il qu'un peuple disparaisse pour savoir qu'il existe?" 

Texte de Bikhaj Ratman Ag Sid El Beku, Comment se faire aimer des femmes. 

Si tu veux être aimé d'une femme, 
Reste assis auprès d'elle : tu l'honores. 
Laisse-lui les rênes longues par complaisance,
Dresse ton cou plus qu'elle ne dresse le sien
Et montre une fierté
Comme elle ne peut en tirer de son sac. 

Vous trouverez ces recueils sur Amazon, Ebay, Fnac. Je les ai trouvé par chance chez un bouquiniste 5€ les deux.  

vendredi 20 novembre 2015

L'enfant noir de Camara Laye


 Pourquoi L'enfant noir? Pourquoi Camara Laye.

Lorsqu'on ouvre un livre, on espère y trouver quelque chose, en tout cas en ce qui me concerne. J'ai été attirée par ce livre d'abord parce que je n'avais jamais lu Camara Laye et ensuite parce que tout le monde connaît son poème " Femme noire, femme africaine, ô toi ma mère je pense à toi". Puis, en lisant la quatrième de couverture j'ai été conquise par ce passage " Aîné de la famille, le petit garçon est destiné à prendre la relève de son père à l'atelier et, surtout, à perpétuer l'esprit de sa caste au sein du village. Mais son puissant désir d'apprendre l'entraînera inéluctablement vers d'autres horizons, loin des traditions et des coutumes de son peuple." 

Je me suis alors posée ces questions : 
- A quoi l'enfant noir a t-il renoncé? 
- Quels sont les compromis qu'il a dû faire? 
- De quelle connaissance s'agit-il? D'où lui vient cette soif d'apprendre ? 
- etc...

Finalement de quoi parle cette oeuvre de Camara Laye  ?

Donc  L'enfant noir, c'est l'histoire d'un enfant noir (lol), c'est l'histoire d'un petit garçon que l'on voit grandir d'abord dans les jupons de sa mère à Kouroussa et parfois dans celles de sa grand-mère lorsqu'il est en vacances  à Tindican.

"On m' y aimait fort, on me choyait, et ma grand-mère particulièrement, pour qui ma venue était une fête ; moi, je la chérissais de tout mon cœur". 

 Puis on suit ses aventures à l'école française et à quinze an c'est le grand départ pour Conakry, "j'allais y suivre l'enseignement technique à l'école Georges Poiret, devenu le Collège technique". A Conakry, il est auprès de ses oncles, de ses tantes et ses études dans la capitale seront pour lui une opportunité pour un plus grand voyage. 

De l'enfant ...à l'homme. 

On peut diviser le livre, pour moi, en deux temps. Un premier temps où Camara Laye est un petit garçon très proche de sa mère et en admiration devant son père et un second temps où il devient un homme et doit faire des choix. Jusqu'à ce qu'il devienne un homme (notamment par son initiation et circoncision), ce sont les autres qui prennent des décisions pour lui, il suit ce que la coutume veut de lui, fait ce que ses parents attendent de lui et surtout ce que sa mère considère comme meilleur pour lui. 

Ce qui m'a particulièrement intéressée dans ce livre, c'est le poids de la coutume et du destin pré-établi par la tradition sur les choix de Camara. De plus, tous ces choix se font dont un contexte où les pays d'Afrique réclamaient, se battaient pour leur indépendance. Mais, ça, Camara Laye, ne le relate absolument pas.

Ce qui m'a plut dans ce livre c'est simplement d'avoir pu voyager avec l'enfant noir. Face à ses décisions me demander si j'aurais fait la même chose, si j'aurais agit de la même manière. J'aurais voulu que l'auteur se concentre sur un point en particulier, sa relation avec ses parents. Sa mère qui veut le garder auprès d'elle et son père qui a tant à lui transmettre. Mais c'est cette dernière relation qui attise davantage ma curiosité. Ce que ressent le meilleur forgeron de la région qui voit son fils lui échapper. 

"J'ai peur, j'ai bien peur, petit, que tu ne me fréquentes jamais assez. Tu vas à l'école et, un jour, tu quitteras cette école pour une plus grande. Tu me quitteras, petit..."

Autres points intéressants.

Autre point, lorsqu'on lit un livre où l'action se passe dans des lieux que l'on ne connaît pas, ici
Mosquée sur la route Kouroussa par Julien Harneis
Kouroussa, Tindican, Conakry, c'est que l'on voyage avec le narrateur. On apprend des cultures, des rites et des traditions. Et dans ce roman autobiographique on est pas déçu. C'est d'ailleurs une bonne lecture pour entrevoir comment dans certaines parties du monde la religion se mélange à la culture, à la façon de percevoir et de se réapproprier les choses sans en dénaturer le principe, disons. Bien sûr, nous sommes en 1953 lorsque le roman est publié et lorsqu'il est enfant, on doit être un peu près dans les années 30. Mais c'est un point de départ pour une réflexion.

Conclusion, ce livre de 175 pages se lit assez rapidement, il est considéré comme un classique de la littérature africaine francophone! Très bien écrit, simple, sans chichis ...mais je reste frustrée car j'aurais voulu en savoir plus...

Guinée par Digitalain 
Je vous invite à visiter ce site : http://kouroussa.org/ et d'autres sites comme Visiter l'Afrique , Flickr,  pour découvrir les belles régions de la Guinée et d'Afrique de l'Ouest dont Camara Laye prend beaucoup de plaisir à nous décrire. 

mardi 10 novembre 2015

Sage parce qu'il sait qu'il ne sait rien...Socrate

L'apologie de Socrate, c'est le procès de celui qui contre tous va se défendre des accusations de Mélétos et  autres pseudo-savants. Qu'ont-ils contre Socrate? Officiellement, il est accusé de " corrompre la jeunesse, de ne pas croire aux dieux qu'honore la cité et d'introduire de nouvelle divinité". Mais vraisemblablement, ils supportent peu ( Mélétos et sa clique) d'avoir été mise à nu par Socrate, eux qui au summum de la prétention pensent être des connaissant dans leur domaine.

C'est avec des arguments peu construits que Mélétos va se présenter devant les juges afin de faire condamner Socrate à la peine de mort.
Zwaambu la moustique
Dans le métro rennais

Je répète encore une fois, quel a été le crime de Socrate? affirmer que la Pythée ("prêtresse d'Apollon, à Delphes, exprimait la parole de dieu qu'interprétaient les prêtes du temple...") a dit de lui que personne n'est plus sage. Et comment se fait-il donc que Socrate soit le plus sage? Il donnera lors de son procès cet argument "je sais que je ne sais rien".

Socrate est contre ceux dont l'ignorance pousse à croire qu'ils sont des experts, ceux qui s'enrichissent par leur connaissance (les sophistes), c'est ceux-là que Socrate accuse de ne rien savoir.

Ce que j'aime chez Socrate c'est d'avoir avec humilité essayé de se défendre. Il n'est pas tombé dans le piège de vouloir susciter la pitié ou autre chose puisqu'il se considère être dans la vérité. Mais est-ce bien Socrate ou alors le Socrate de Platon, avec quelques exagérations  sur les vertus de son maître?

Quoi qu'il en soit, c'est un livre qui plaide pour l'humilité et la recherche constante de la connaissance, cet océan sans fond.

samedi 28 décembre 2013

"Lire c'est chiant! "

Un débat avec mes sœurs et des amis m'ont poussé à écrire cet article. Il suscitera chez vous aussi je l'espère quelques réactions!

Quand lire est un calvaire. 
Il y a des gens pour qui lire est une allergie, c'est ce que je croyais aussi. A l'époque, hors de question de dépasser les 200 pages, de toutes les façons j'arrêtais avant. Alors, je comprends tous ces gens pour qui lire est un combat contre soi-même. 
Je pense que personne ne déteste la lecture. Toutefois, avant de se lancer dans des résolutions inutiles il faut déjà se poser ces questions; Qu'est ce que j'aime? Quelles sont les choses qui dans la vie de tous les jours m’intéressent? Dans quel contexte ( de ma vie) je me trouve? Eh oui, à mon humble avis, la lecture est existentielle.  Alors ce n'est pas la peine de faire comme le voisin, vous n'êtes pas le voisin! Il faut rester soi même. Il y a quelques années, je lisais Le discours de la servitude volontaire de La Boetie. Certes c'est 61 pages mais c'était à un moment " de ma petite existence" où je m'intéressais pas mal à la philosophie, la politique, la justice et j'en passe! Je dirai qu'il faut lire au gré de ses "humeurs". 

...Ça évite que la lecture tourne mal
Combien de livres m'ayant coûté une aile sont restés sur ma table sans être finis ou lus? On peut pas forcer avec la lecture, que ce soit pour se donner bonne conscience ou se booster suite à des résolutions prises dans l'euphorie de la nouvelle année! Alors avec la lecture, ne soyons pas "prétentieux" on y va doucement! 

..De la BD au Contes Initiatiques Peul!
NASA and The Hubble Heritage Team (STScI/AURA)
Ma jeunesse se compte en dessins animés! Je dévorais les bandes dessinés qui pour moi  étaient la continuité du petit écran. Il faut dire que la télé était occupée par Papa-devant-le-journal-en boucle-depuis-déjà-deux-heures. Pourtant je n'étais pas une grande lectrice , seulement je lisais ce qui m'intéressais. Ainsi je suis passée de la BD, au roman policier et maintenant à la littérature orale. Au fur et à mesure du temps et de l'âge la bibliothèque change et puis on a aussi " autre chose" à faire jusqu'au jour où tout bascule...

Lire pour exister! 
Vous est-il déjà arrivé d'être dans un débat où la personne qui parle a des arguments tout à fait contestables mais voilà, nous n'avez aucunes sources?  Je crois que c'est l'une des plus mauvaises expériences auxquelles je dois encore faire face aujourd'hui! C'est une hantise. Être devant une personne et ne pas pouvoir argumenter!
Aussi, lire ouvre l'esprit et l'imagination. Il n y a pas très longtemps je racontais à un ami un peu opportuniste le conte " l'origine de la chauve souris" d' Hampâté Bâ! Sauf erreur de ma part, ça l'a bien fait cogiter!
Quand on lit, un autre monde s'ouvre à nous.. 

Bref, pour moi il y'a toujours une bonne raison pour lire.
Qu'en pensez vous? 

vendredi 13 décembre 2013

Njeddo Dewal, la calamiteuse Vs Bâgoumâwel

 Petit retour sur la lecture des Contes initiatiques Peul d'Amadou Hampâté Bâ. Le livre contient deux contes Njeddo Dewal, mère de la calamité et Kaïdara .

 Contes initiatiques Peul / Amadou Hampâté Bâ / Pocket / 238 pages


En Bref
Le conte est structuré en 3 parties dont une introduction. Tout d'abord, la " Généalogie mythique de Njeddo Dewal d'après la cosmogonie du Mandé", cette partie retrace la création du monde par le Dieu créateur suprême Guéno, l'Eternel. 

La première partie conte l'histoire du paradis perdu dans le Wâlo, à Heli et Yoyo. Les peuls vivaient dans l'abondance et étaient heureux. Au bout d'un moment ils commencèrent à avoir une mauvaise conduite.
C'est  de là que Guéno se fâcha et créa Dewal Inna Baasi, la Grande Mégère speténaire, mère de la calamité. Petit à petit, la Grande calamiteuse prit du pouvoir. 

 Dans la deuxième partie, on suit l'aventure et le sacrifice de Bâ-Wâm' ndé, Siré et autres personnages, tous ayant un rôle capital. Enfin, vient Bâgoumâwel l'enfant prédestiné, le héros....

Avis...
 Ce conte m'a tenu en haleine du début à la fin. Je me voyais déjà produire le film et faire sa promo' dans les salles de cinéma! Bref, il a été totalement initiatique. Encore une fois, j'admire la qualité d'écriture H.Bâ. Les expressions, le ton, l'humour, les tournures de phrases ont fortement contribué à me plonger rapidement au pays de Heli et Yoyo. Le petit truc à redire, c'est qu'à mon avis sur certains passages il y a beaucoup de longueurs. Et même si c'est nécessaire à la compréhension du texte, trop de notes, de renvois

Petite histoire: 
 J'attendais patiemment le bus et j'étais arrivée à la page 61, après le songe de Welôré épouse de Bâ-Wâm'ndé. Dans cette partie Bâ-Wâm'ndé y est décrit comme un homme droit et respectueux des animaux. C'est d'ailleurs cette bonté et bienveillance qui va l'aider à combattre Njeddo. Depuis le jour où j'ai lu cette partie, je ne vois ni les araignées , ni les fourmis de la même manière. Assurément, après n'importe quelle lecture, on ne voit plus les choses de la même façon. C'est fou à quel point lire ouvre l'esprit !

Extrait 

" Ainsi, tu cherches un sourd-muet-borgne et tu n'as pas dédaigné de me questionner. L'as-tu fait parce que je suis moi-même bossu-borgne-boiteux-cagneux ou pour un autre motif?" 
Bâ-Wâm'ndé répondit: " Combien de fois n'est-il pas arrivé que l'on trouve une perle rare dans une petite marre alors que l'on a cherché vainement dans le grand océan? 
-Eh bien, Bâ-Wâm'ndé! Celui qui ne méprise pas de s'informer auprès de tout le monde est sûr de découvrir ce qu'il cherche... 
 

Je recommande et attends vos avis ;)